Arrivée d’Haïti avec sa famille à l’âge de 11 ans, c’est à Saint-Laurent du Maroni que Tamilia a grandi et c’est là qu’elle a voulu revenir, après ses études à Cayenne, avec le désir de contribuer au développement de sa ville de cœur.
En juillet 2021, à 26 ans et tout juste diplômée d’un master en économie, Tamilia s’engage à l’Adie en tant que conseillère, avec pour mission d’aller à la rencontre des populations des « quartiers ».
« Ici par quartiers, on entend aussi bien les quartiers populaires relevant de la politique de la ville comme Saint-Jean que les quartiers d’habitat spontané comme le quartier malgache, des bidonvilles peuplés par des milliers de migrants arrivés par le Surinam tout proche. »
Parce qu’il s’agit de populations qui n’ont pas les codes et ne connaissent pas les dispositifs pouvant les aider à donner vie à leurs initiatives économiques, l’Adie prend les devants pour faire connaitre ses services aux éventuels porteurs de projets qui ne sauraient pas la trouver autrement. Deux fois par semaine, Tamilia se rend sur le terrain :
« Je me balade, je repère les nouvelles têtes et je me présente. »
Petit à petit, elle se fait connaître des habitants, gagne leur confiance et tisse des relations durables.
Près de 80 % des entrepreneures que Tamilia finance sont des femmes. Dans le quartier politique de la ville de Saint-Jean, comme Farah, savonnière, elles créent souvent des activités dans le domaine l’esthétique, de la décoration et de l’événementiel.
Dans les quartiers d’habitat spontané, les populations migrantes veulent créer leur activité autant par nécessité, à défaut de trouver un emploi salarié, que par esprit entrepreneurial car beaucoup ont déjà exercé une activité à leur compte et sont porteurs d’une expérience et d’un savoir-faire qu’ils sont prêts à mobiliser à nouveau. Il s’agit souvent de femmes originaires du Surinam, d’Haïti, du Brésil, de Saint Domingue qui ouvrent de petits commerces alimentaires, des bars ou créent une activité de restauration.
« Le rôle de l’Adie est primordial car nous sommes les seuls à aller vers les habitants des quartiers. Avec nous, ils trouvent une écoute, un appui, un encadrement. Je prends plaisir à aller vers les gens et quand je les vois faire ce qu’ils aiment, j’ai réussi. »
Tamilia échange avec tous les habitants, qu’ils soient régularisés ou pas.
« Le travail de terrain que je mène nécessite de se débarrasser de toute appréhension ou idée préconçue car une multitude de micro-entrepreneurs en herbe vivent dans ces quartiers, toujours en mouvement et en transformation. »
À ceux qui ont déjà un récépissé et ont besoin d’un financement, elle propose un financement sur-mesure pour leur permettre d’acheter ce qu’il leur faut pour se lancer. Il s’agit de prêts de groupe de petits montants (500 € en moyenne) échelonnés sur une durée de quelques mois, correspondant à la validité de leurs papiers.
À ceux qui n’ont pas encore de papiers, elle ouvre des perspectives d’espoir en leur expliquant comment ils pourront ensuite solliciter l’Adie. Je leur dis :
« Vous serez entrepreneur demain. Et demain, l’Adie sera là pour vous. »