Pour Soumiya, assistante administrative, son entreprise est synonyme d’espoir

« J'ai mené une véritable lutte pour faire valoir que, malgré mon handicap, je suis humaine avant tout. Après mon accident, l’Adie est apparu comme une solution idéale. Ça a été mon tremplin. »
Née à Tarascon, dans les Bouches-du-Rhône, Soumiya suit un parcours scolaire classique, mais met ses études entre parenthèses lorsqu’elle tombe enceinte de son premier enfant. Elle se consacre alors totalement à l’éducation de sa petite fille. Et une fois devenue grande, la mère de famille reprend le chemin des bancs d’école et suit une formation médico-sociale, indispensable pour passer le diplôme d'État d'accompagnant éducatif et social (DEAES). Une fois son précieux sésame en poche, elle tente sa chance à côté de chez elle, à l’école d’aide-soignante de Nîmes, dans le Gard. Admise dans ce cursus, elle est pourtant contrainte de ne pas le suivre car elle n’avait pas de mode de garde pour sa fille. Elle se résigne par dépit.
« Ma fille passe avant tout. J'ai tenté ma chance, j’ai vu de quoi j'étais capable et maintenant je sais que quelque chose de mieux m’attend ailleurs. »
Soumiya décroche un CDI comme vendeuse-façonneuse en boulangerie, jusqu’à ce que le pire se produise. Le 19 juin 2013, la mère de famille, alors enceinte de son deuxième enfant, subit un violent accident de la route. Son bébé est épargné, mais Soumiya devient paraplégique.
Et comme un malheur n’arrive jamais seul, petit à petit tout s’écroule autour d’elle. Incapable de tenir son rang en boulangerie, les difficultés financières pointent le bout de leur nez, et son conjoint la quitte.
« J’ai vraiment vécu le pire en quelques semaines. Un grave accident, une séparation, ma perte de travail, des difficultés financières et surtout mon état physique. J’étais au bout de moi-même, je ne savais plus quoi faire. »
Mais Soumiya ne baisse pas les bras. Malgré tout cet acharnement, elle s’accroche et redouble de créativité pour s’en sortir. Alors, elle se met à récolter des vêtements et des objets dont les gens ne voulaient plus, puis à les revendre. Le tout en fauteuil roulant !
Cinq ans après son accident, la Chateaurenardaise se rend dans son agence Pôle emploi et passe plusieurs formations dans le domaine de l’administratif, puis dans la comptabilité.
« En janvier 2018, j’ai rejoint ma première formation professionnelle depuis mon handicap, accompagnée par mes 2 enfants. En plus de mon fauteuil, j’avais un véhicule spécialement adapté à mon état. »
Grâce à une voiture adaptée à son handicap, Soumiya entrevoit le bout du tunnel. Elle enchaîne plusieurs stages et formations dans divers secteurs d’activité, pour avoir plusieurs cordes à son arc.
Lors de l’un de ces stages, elle découvre la comptabilité. Comme soulagée par le regard plein d’espoir que ses tuteurs lui portent, Soumiya prend conscience à cet instant d’un élément majeur. Après tout ce qu’elle a vécu, grâce aux diplômes qu’elle a obtenu et aux qualités qu’elle a développées, sa destinée est d’être sa propre cheffe d’entreprise. Qui mieux qu’elle pouvait comprendre ses besoins ?
« Durant ces formations, j'ai développé un vrai réseau professionnel. J'ai constaté que j'aimais aider les personnes, que ce soit pour l’administratif, la comptabilité, du secrétariat, etc. Je me sentais revivre. »
Soumiya prend alors conseil auprès de tous les interlocuteurs de l’emploi qu’elle connaît (Cap Emploi, boutiques de gestion, Chambre des Métiers, etc.) et se rend dans sa banque pour préparer le terrain avant d'entamer la création de sa propre entreprise.
3 000 €, c’est la somme que demande Soumiya. « Non », c’est la réponse de sa banquière lorsqu’elle découvre la situation de la mère célibataire en situation d’handicap. C’est donc un retour à la case départ.
« Je suis cliente dans cette banque depuis 17 ans. J’espérais recevoir un petit geste de leur part, mais rien. Vu que je ne suis pas salariée, que je n’ai aucun revenu mis à part ma pension d'invalidité, ils estimaient que je ne pourrais pas rembourser mon prêt. »
Soumiya cogite alors. Elle songe même à tout arrêter. Mais son projet lui tient trop à cœur, et elle se met à chercher une solution alternative. C’est alors qu’elle se rappelle des mots prononcés par un intervenant lors d’une formation : « Quand il n’y a plus d’espoir ailleurs, il y a toujours l’Adie. »
« En me renseignant, j’ai appris avec surprise que des membres de ma famille ont fait appel à l’Adie aussi, et que ça s’était très bien passé. »
Par téléphone, elle prend rendez-vous avec l’association et est reçue dans l’agence d’Avignon. Lorsqu’elle est reçue par sa conseillère Fam-Ky pour la première fois, les besoins de Soumiya sont évalués, et une demande de microcrédit est effectuée. Deux semaines plus tard, le prêt est accordé et la Bucco-rhodanienne crée son entreprise.
« J’étais agréablement surprise. L’Adie m'a fait confiance, ma conseillère n’a pas eu peur de mon handicap. J'étais heureuse et si soulagée ! »
Aujourd’hui, Soumiya est une cheffe d’entreprise modèle de 35 ans, dans le secteur de la gestion administrative. À Châteaurenard, elle a trouvé le rythme de travail qui lui convient, permettant ainsi de jongler entre ses activités professionnelles et sa vie de mère de famille. Satisfaite de ce qu’elle a entrepris, elle souhaite désormais s’occuper davantage de sa communication, et avoir son propre local. Pour la jeune femme, c’est une revanche sur la vie : son rêve est accompli.
« Ayez confiance en vous et luttez contre cette petite voix qui vous dit que vous n'y arriverez pas. Faites des recherches, soyez curieux. Ne vous mettez aucune barrière mentale : foncez ! »